Paillettes Magazine espagne | espoir | Adoption

« Aux petites victoires »
Le témoignage de Mélina & Micka

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Chez Paillettes, pour la période de fêtes, au lieu d’histoires dignes de téléfilms de Noël avec des « happy endings » réconfortants, nous avons choisi de mettre en lumière des parcours qui n’ont pas encore trouvé leur épilogue.

Mélina et Micka partagent ici leur aventure en PMA, là où ils en sont aujourd’hui. Parce que, raconter un cheminement en cours, c’est offrir une autre perspective : celle où la fin n’est pas encore écrite.

 

C’est respecter celles et ceux pour qui lire un final heureux peut être difficile, tout en laissant la place à l’espoir pour imaginer, pourquoi pas, une issue lumineuse.

 

Ces témoignages célèbrent les petites victoires, les instants de joie et de résilience dans un parcours souvent semé d’embûches. Ils nous rappellent que l’essentiel n’est pas uniquement la destination, mais aussi le voyage, riche en apprentissages et en courage.

 

Pour celles et ceux qui sont encore en route, nous espérons que ces récits sauront vous parler, vous inspirer, et vous aider à apprécier l’aventure, une étape à la fois.

Aux petites victoires…

 

Par Mélina & Micka

Notre parcours de vie était tout tracé. Micka et moi allions nous construire un nid douillet, nous marier et accueillir nos enfants. Pour nous, la parentalité était une évidence.

 

Pour ma part, aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours eu un instinct maternel.

 

On s’est dit oui le 11 juin 2011. Les mois ont passé et nous voilà en mai 2012 sans aucun signe de grossesse. Depuis quelques années, ma thyroïde me jouait des tours. Lors d’une consultation chez mon médecin traitant, je lui ai partagé notre désir de maternité. Afin de ne pas perdre de temps, elle m’a orientée vers une endocrinologue. Suite à des examens, le diagnostic révèle la maladie de Basedow. Il fallait mettre en pause le projet bébé pendant un an et demi, pour rééquilibrer ma thyroïde.

 

Dans le but de libérer la parole et de nous sentir accompagnés, nous avons partagé notre situation à nos proches et amis. Cependant, cela s’est avéré plus complexe, car l’affect peut parfois prendre le dessus et certains silences ont été compliqués à accepter.

 

Avec nos amis, le désir de maternité était au cœur des conversations et les annonces égayaient nos soirées. De notre côté, nous serrions les dents, l’accueil de la bonne nouvelle n’était pas instantané. Nous ne parlions plus le même langage et la solitude s’emparait de nous.

 

Lorsque ma thyroïde a été stabilisée au bout de 18 mois, on a relancé les essais naturels pendant un an. Mais rien.

 

Après quelques cycles de stimulation infructueux, nous avons poussé les portes d’un centre de PMA en 2014. Je ne pensais pas en arriver là, mais avions-nous le choix ? Normalement, il est facile de donner la vie, en tout cas on nous l’inculque ainsi.

 

Les examens ont révélé une insuffisance ovarienne pour ma part, le parcours commence : on a fait une première FIV simple, puis une FIV ICSI. Et encore une, puis une autre… six ponctions au total, deux transferts seulement. Les embryons se fragmentaient. N’obtenant aucun résultat et espoir de grossesse.

 

En 2016, ma thyroïde est épuisée et rechute. Les stimulations sont intenses et rapprochées, mon corps fatigue. Une pause s’impose de nouveau pendant 18 mois. 

 

Après des échanges, nous avons repensé à notre projet. Si naturellement la vie ne peut pas nous offrir notre famille, l’adoption en est peut-être la clé. Nous avons participé à des réunions d’information, des conférences, nous avons même rencontré des couples. Suite à cela, nous avons pris la décision d’obtenir notre agrément pour accueillir un enfant. Le parcours dure 9 mois, quelle drôle de coïncidence. Du service à l’enfance, assistance sociale, psychologue, il faut montrer nos capacités à aimer et élever un enfant dans un endroit en sécurité. Pour clôturer, une soutenance individuelle devant un jury a été tenue. Nous devions les convaincre de notre stabilité à être parents. Et un beau jour de mars 2018, nous décrochons le passeport avec une durée de validité de cinq ans, renouvelable tous les ans. Un monde inconnu et brut s’est ouvert à nous. Nous avons postulé auprès d’associations, comme le prévoyait la démarche, et, très rapidement, nous avons découvert l’intérêt financier plutôt qu’humain.

 

Micka voulait se poser et n’avait pas envie de s’engager tout de suite. Quelques mois après, il me confie son souhait d’arrêter ce projet. Il ne se retrouvait pas dans son rôle de père. Compliqué d’entendre ces mots, car je n’avais pas perçu son désarroi. J’avais tellement d’espoir. 

 

Il devait se respecter. Il n’arrivait pas à faire taire sa petite voix qui lui soufflait depuis le début que nous aurons notre enfant naturellement. Notre mot d’ordre a toujours été que nos démarches soient dans l’accord et le respect de l’autre. Je devais accepter sa décision.

 

Début 2019, après quelques mois de remise en question, on est repartis sur le chemin de la PMA, reboostés et plein d’espoir. À nouveau, je réagissais bien aux traitements, mais les embryons ne prenaient pas vie. Les médecins n’avaient pas de solution à notre situation. Ils ont arrêté notre suivi et nous ont orientés vers des protocoles à l’étranger.

 

Pour nous, c’était impossible de renoncer en France, nous avions encore des chances. Alors, on a pris notre dossier sous le bras pour aller questionner d’autres centres.

 

C’est en septembre 2019 que nous avons rencontré un médecin prêt à nous écouter et à retenter de nouveaux protocoles. Après un premier traitement de 17 jours de piqûre et une stimulation peu fructueuse, nous avons maintenu la ponction. Les ovocytes ont été congelés pour donner des chances supplémentaires au prochain traitement. En février 2020, soit 3 mois après, deuxième traitement avec ponction sans grande conviction de la qualité ovocytaire. Mais, grande surprise, nous avons 3 embryons et nous projetons un transfert. Le jour de l’implantation est finalement arrivé, mais un appel une heure avant le départ vient assombrir tous les espoirs. Le transfert est annulé, car le dernier embryon en vie s’est éteint. De nouveau accueillir la nouvelle et l’accepter. La colère et la tristesse l’emportent. Un mois après, le Covid est arrivé, ce qui a obligé le centre à fermer ses portes. Nous sommes restés sans réponse jusqu’en octobre. 

 

En novembre, après le retour post-covid, le médecin nous tient le même discours. Il nous conseille d’envisager le don d’ovocyte. Mon corps ne réagit plus au traitement et j’ai autant de chance de tomber enceinte naturellement. C’était une claque si violente. Je n’étais pas prête à accueillir des ovocytes d’une tierce personne. J’avais cette sensation que mon mari allait faire un enfant avec une autre femme. Micka me disait de garder espoir, mais, pour moins souffrir, je me préparai au « deuil » de la maternité.

 

En janvier 2021, mon envie est trop forte. Je veux trouver des solutions à notre problème. Au fil des recherches sur internet, je rencontre une naturopathe avec qui je commence un suivi. Un mois après, je rentre en contact avec Laurène d’« Emancipées ». En novembre 2021, je débute un programme fertilité avec des femmes qui sont dans la même situation que moi. Une vraie mine d’or, un bel apprentissage. J’ai retrouvé confiance en mon corps et je me réconcilie avec lui. Il a tous les éléments en sa possession pour m’aider. Des professionnelles nous accompagnent et nous portent pendant 3 mois. Après plusieurs années où je me suis abandonnée à la médecine, noyée sous des termes incompris, à fonctionner en mode robot, enfin, je reprenais les rênes.

 

En mai 2022, on nous parle de la naprothechnologie (PMA en plus naturelle). On veut tenter l’expérience, elle correspond à notre état d’esprit du moment. Le médecin nous met en confiance. Malheureusement, malgré des alertes partagées sur un médicament, ma thyroïde ne supporte pas et s’emballe.

 

En octobre 2022, une nouvelle récidive d’hyperthyroïdie se révèle. 

 

L’épuisement physique et mental se fait entendre. Le déclic se produit en moi. Micka et moi discutons de nos options : nous envisageons soit de reprendre le parcours d’adoption, soit de nous lancer dans un parcours de FIV avec don d’ovocytes à l’étranger. Après une réunion avec l’aide à l’enfance, nous avons fermé la porte à l’adoption. Le discours peu encourageant des services ne nous poussait pas vers ce choix. Le don d’ovocytes arrive à nous et tout s’enchaîne très vite. En février 2023, Micka dépose ses paillettes dans un centre en Espagne.

 

En parallèle, je passe une IRM qui révèle deux fibromes, dont un, assez gros et mal positionné. Alors que nous devions lancer la recherche de la donneuse, la clinique espagnole ne peut donner suite. Il faut enlever cette masse afin de favoriser le bon déroulement d’une grossesse. Trouver un chirurgien qui accepte de m’opérer, tout en prenant en compte notre projet, a été un parcours en soi. Mais après plusieurs consultations, j’ai enfin rencontré un médecin qui a su nous accorder du temps, de l’écoute et de l’empathie. Je lui adresse mon plus grand merci, car, en août 2023, je me fais opérer et me réveille avec un utérus prêt à accueillir bébé.

 

Entre-temps, nous avons décidé de changer de clinique en Espagne pour bénéficier d’un accompagnement plus humain. En mars 2024, début d’un protocole « test » afin d’observer les réactions de mon corps. Dès le début, mon taux de progestérone était anormalement élevé, sans explication de la part de la clinique. Elle nous conseille de reporter le protocole en avril. Deux semaines plus tard, un vendredi soir, après un footing, de violentes douleurs m’ont clouée au sol pendant une heure. Bien que la douleur ait temporairement disparu, elle est revenue, encore plus forte, le dimanche et Micka prend la décision de me conduire aux urgences.

 

Là-bas, je me suis heurtée à l’indifférence : une infirmière maladroite qui m’adresse un ton moralisateur de faire un traitement à l’étranger et une longue attente dans une chaise en plastique pliée par la douleur. J’étais seule, car Micka n’avait pas le droit d’être à mes côtes. Personne ne semblait me prendre au sérieux, jusqu’à ce qu’un médecin urgentiste intervienne. Après une prise de sang et une consultation, un résultat inattendu survient : « Vous êtes enceinte » et, avec toute sa gentillesse, elle me met en garde de la finalité. J’avais conscience que rien n’était normal, mais pour la première fois de ma vie, on me prononçait ce mot tant attendu. Je me suis sentie plus que jamais femme. Et quelle victoire, on avait réussi naturellement, juste le fruit de notre amour. Je n’ai pu retenir mes larmes malgré la suite qui s’annonçait compliquée.

 

Tout s’est enchaîné très vite : à peine avais-je prévenu Micka que j’étais déjà au bloc opératoire. Le verdict tombe, je fais une grossesse extra-utérine avec une hémorragie qui mettait ma vie en danger. Il fallait agir rapidement. Avec beaucoup de chance, je suis prise en charge par la gynécologue responsable du pôle PMA. Elle m’avertit qu’elle n’était pas sûre de pouvoir sauver ni ma trompe ni mon utérus. Dans le tourbillon d’émotions, j’ai simplement supplié : « S’il vous plaît, sauvez mon utérus. ». À peine le temps d’adresser une prière que je m’abandonne et laisse mon corps entre leurs mains.

 

À mon réveil, on m’annonce que tout s’est bien passé et que rien n’a été enlevé. Mes chances de porter la vie reprennent espoir. L’arrivée dans ma chambre m’emmène dans une réalité. Je suis au service maternité, avec un lit bébé qui m’attend et n’accueillera pas notre enfant. Une sage-femme, pleine de délicatesse, comprend très vite et me libère de cette situation. 

 

Suite à l’hémorragie et à ce tourbillon, il a fallu se reconstruire physiquement et psychologiquement.

 

Lors de la consultation postopératoire, la gynécologue nous annonce une incroyable nouvelle : l’embryon s’était implanté sur l’ovaire, ce qui a permis de préserver ma trompe et mon utérus.

 

Heureusement, pour mes 40 ans, nous avions prévu un voyage aux Maldives. Ce séjour est tombé à point nommé, nous offrant une bouffée d’air frais.

 

À la suite de mon retour de couche en juin, nous avons repris contact avec la clinique en Espagne pour programmer un protocole sur cycle naturel à la fin août. Mais, nous voilà de nouveau confrontés à une problématique, aucune activité ovulatoire ne se profile. Malgré des injections et des patchs, ça ne réagit pas. Un nouveau cycle test débute en octobre, le constat est le même. Mon corps me parle et je dois plus que jamais l’écouter. Nous prenons la décision de stopper le protocole et d’aborder la fin de l’année sereinement. En parallèle, nous avons entrepris une thérapie avec un psychologue kinésiologue. Son écoute bienveillante et ses conseils nous ont apporté le soutien dont nous avions besoin pour nous reconstruire.

 

Avec Micka, nous restons résolument positifs. Malgré le temps qui passe, entre la stimulation, la FIV, l’adoption, la naprotechnologie et le don d’ovocytes en Espagne, nous continuons d’avancer, ensemble. En treize ans, il est évident que ce désir de parentalité a apporté du changement dans nos vies personnelles et professionnelles. Notre couple a traversé des périodes difficiles et la séparation a été à plusieurs reprises évoquée. La culpabilité m’envahissait et me poussait à rendre la liberté à Micka pour qu’il puisse fonder sa famille. Mais, comme il me disait justement, notre amour est plus fort et nous devons rester soudés. Notre couple n’est pas le problème, mais c’est ce que nous vivons qui nous rend vulnérables. Nul ne peut dire où cela nous mènera, mais nous gardons confiance. Ma foi me porte énormément aujourd’hui et m’aide à avancer dans l’espoir d’être exaucée. Nous nous sentons plus forts, plus matures, et nous ne sommes pas prêts à abandonner cette petite voix intérieure qui nous pousse à continuer.

 

Ce parcours a été parsemé d’épreuves, mais aussi de belles rencontres. Il nous a appris à cultiver la résilience, à trouver des ressources insoupçonnées et à nous rapprocher encore plus l’un de l’autre.

 

Aujourd’hui, je veux que notre témoignage soit une lumière pour d’autres couples qui traversent cette attente. Nous ne sommes pas seuls, et chaque parcours est unique. Ce n’est pas un chemin linéaire, mais il est plein d’humanité, d’espoir et de petites victoires, aussi infimes soient-elles.