Paillettes Magazine Savoir dire stop | arrêter la PMA | PMA

« Bats-toi jusqu’au bout, mais au bout de quoi ? » Le témoignage de Sandrine

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Sandrine partage son parcours de PMA, entre endométriose, piqûres, rendez-vous à l’aube… et un choix courageux : celui d’arrêter la PMA, après 4 échecs IAC et 3 échecs de FIV, sans utiliser les 4 FIV autorisées par la Sécurité sociale. Un témoignage infiniment précieux. Parce qu’on dit souvent « bats-toi, va jusqu’au bout » — mais jusqu’où exactement ? Ce récit brise le silence sur les échecs, la charge mentale, et la légitimité de dire stop.

Quand l’endométriose chamboule tout !

Des enfants, j’en voulais… un jour. Dans l’absolu. Mais à 31 ans, en 2007, tout a basculé : de violentes douleurs à l’ovaire. Ma gynécologue ne sentait rien à l’examen, donc,  ça devait être dans ma tête. « Tout le monde a mal à un moment donné, ce n’est rien » ai-je entendu. Premier choc : je ne suis pas crue.

Alors j’ai insisté pour avoir une échographie. Qu’on finit par m’accorder de mauvaise grâce, en suggérant que je contribue à creuser le trou de la Sécu pour rien ! Et là, pendant l’examen, tout s’emballe : on parle d’urgence, de radio, puis d’IRM. Finalement, après des examens complémentaires, on me dit que c’est « juste » un kyste hémorragique. On me conseille de ne surtout pas l’enlever (comme si je pouvais le faire toute seule !). Aucune explication, pas de temps à me consacrer et je ressens beaucoup de mépris de la part des soignants devant mes questions.

 

Je cherche alors un autre avis et j’obtiens un rendez-vous avec un gynécologue hospitalier. Il m’explique que cela peut être grave… ou pas. Il faut attendre. Quelques mois plus tard, toujours la même douleur. Le kyste est retiré. À mon réveil, le diagnostic tombe : endométriose. Il y en avait à plusieurs endroits. Et là, je suis prévenue : « Ça va être compliqué pour faire des enfants, ne tardez pas ». Je suis passée du soulagement — on enlève ce truc qui fait mal – à « je dois décider tout de suite si je veux des enfants ou pas. »

J’étais en couple, mais ce n’était pas l’homme de ma vie. On n’en était pas là a priori. Mais après quelques mois de réflexion, mon conjoint m’a annoncé qu’il était partant. OK, c’était maintenant

Infertilité et PMA : métro, boulot, piquouses

On a essayé naturellement pendant un an et ça n’a pas fonctionné. Puis, le docteur nous a fait faire des « essais naturels monitorés » : tous les matins à 6h, tous les jours, en week-end, en vacances, je prenais ma température. Et je devais suivre le même régime que les femmes enceintes pour maximiser les chances : pas d’alcool, pas de viande crue… Dès le début, c’était hyper contraignant. Normalement, pour avoir un enfant, c’est juste du sexe. C’est plutôt sympa. Là, tout est devenu froid, du médical dans notre intimité. Rien n’était spontané. C’était compliqué intérieurement… et ça n’a pas marché.

On nous a fait passer aux inséminations. C’était la course : le matin j’allais faire des prises de sang dans un endroit, puis des échographies dans un autre, puis j’allais au boulot. Le soir, c’était  le stress pour attraper le train de banlieue à l’heure pour aller faire la piqûre, qui m’attendait dans le frigo de la maison (pas de frigo au boulot pour la stocker). Le jour de l’insémination, j’allais chercher le sperme de mon conjoint en plein Paris à l’heure du déjeuner. J’attendais deux heures, je courais avec mon précieux chargement chez le gynéco, qui procédait en 3 minutes à l’insémination et zou, je retournais travailler, épuisée physiquement et mentalement, tout en prenant des commentaires sur « mes déj’ de ministre ».

On a fait 4 inséminations en 6 mois. Les médecins disaient : « Faites votre vie normalement ». Désolée, mais non, je ne faisais pas juste ma vie normale. Je n’étais jamais détendue. Au quotidien je courais, dans les moments festifs, je ne devais manger que des légumes, sans boire… Je ne pouvais rien prévoir : pas de vacances, pas de théâtre, parce que le stylo d’injection doit rester au frigo… je me suis retrouvée enfermée dans une vie qui tournait autour de ça et zéro explication de pourquoi ça ne marchait pas.

J’avais l’impression de voir un maître d’école qui regardait ma production d’ovocytes, mais sans rien m’expliquer de concret : ce qu’il prévoit, ce que je vis, ce que j’ai, comment fonctionne le traitement, pourquoi ça n’a pas marché, et qu’est-ce qui va faire que ça va marcher … Rien ! C’était assez nouveau, je suis rentrée dans une matrice dont je voulais sortir. Le côté humain était inexistant. Au mieux, les soignants étaient totalement indifférents, au pire, méprisants et désagréables.

 

En 2009, comme les inséminations n’avaient pas fonctionné, on nous a dit d’aller à l’hôpital pour tenter des FIV. Personne ne savait nous dire si c’était grave ou pas. Je savais juste que j’avais de l’endométriose et mon conjoint n’avait rien de spécifique. Le service a fermé pour l’été donc on devait revenir en septembre. Pendant cet été-là, avec mon conjoint, on s’est séparés. Ce n’était pas la PMA qui nous a séparés, mais ça a été un déclencheur. Ça faisait 6 ans qu’on était ensemble. J’étais en colère d’avoir fait tout ça pour rien, mais soulagée de ne pas être tombée enceinte, parce que ça aurait été horrible d’être séparée avec un enfant à peine né.

35 ans, célibataire et stérile.

Niveau feel good, je vous laisse imaginer ! Ce n’était vraiment pas gagné que j’aie des enfants plus tard. Quel homme voudrait se mettre avec une fille stérile ? Pour moi, c’était hyper clair que si je rencontrais quelqu’un, je ne voulais pas qu’il ait déjà des enfants, pour qu’il découvre la parentalité avec moi. Donc, ça réduisait le spectre de la recherche.

 

Je pensais que j’allais mourir dévorée par mes chats, comme Bridget Jones. Tu te sens bien ostracisée quand tu n’as pas d’enfants ou de mec stable à cet âge-là ! En plus stérile, j’étais la paria… et puis, quand les gens ne savent pas quoi dire, ils ne parlent que de leurs gosses. Je n’ai jamais compris pourquoi cette maladresse et/ou absence totale d’empathie à mon encontre.

 

Mais à 36 ans, contre toute attente, j’ai rencontré le prince charmant ; sans carrosse, avec sa Clio bleue. Il avait 7 ans de moins que moi. Il habitait à Toulouse, moi à Paris. On a commencé à sortir ensemble et assez rapidement, je lui ai dit que j’avais des problèmes de fertilité. Et c’est compliqué de dire à quelqu’un que ça va être difficile d’avoir un enfant. Je ne voulais pas passer pour la fille pour qui c’est une priorité ; je ne cherchais pas juste un géniteur, mais je ne pouvais pas cacher cette vérité. Heureusement, il n’est pas parti en courant. C’est même tout l’inverse.

Relancer un parcours PMA à 37 ans

On était en 2012, j’avais 37 ans. C’est à ce moment que mon conjoint m’a dit qu’il voudrait qu’on ait des enfants. Moi, j’étais focalisée sur notre belle histoire d’amour. Je ne m’autorisais pas à penser à la maternité. Mais quand il m’a dit ça, on a décidé de repartir à l’hôpital. On a refait les examens. Dans ma tête, comme j’avais 38 ans, j’imaginais le pire : ça allait être difficile, ou j’aurais plus de risques d’avoir un enfant handicapé… Pourtant, les médecins étaient hyper rassurants, même si j’avais l’impression qu’ils n’expliquaient jamais rien. Juste : « Ça va aller, faites-nous confiance ».

 

S’en sont suivis 25 jours de stimulation très difficiles, physiologiquement, en termes d’organisation et de rythme : levée tôt le matin pour prendre le premier train de banlieue pour réaliser les échographies et les prises de sang. Je rentrais vite le soir chez moi avec mon train de banlieue pour me faire la piqûre à l’heure dite. Vie sociale : zéro. J’étais épuisée, et ça jouait sur mon mental. À l’hôpital, il me semblait même que les infirmières m’engueulaient : « Vous êtes dure à piquer !». J’avais des bleus partout sur les bras. 

Vient le jour de la ponction : l’usine. Douche à la Bétadine et cheveux mouillés (en plein novembre), on m’a fait traverser l’hôpital tout entier sur un brancard , en chemise d’hôpital, les fesses  à l’air ! Dans la pièce de ponction, le médecin ne s’est même pas présenté, il ne m’a même pas adressé la parole. Et il y avait plein d’autres personnes dans la salle, ils parlaient de leur vie, de ce qu’ils avaient fait le week-end en m’ignorant totalement. Moi, j’avais les pieds dans les étriers face à la porte, et des gens entraient et sortaient. Une scène surréaliste. Je me sentais tellement vulnérable !

Puis, on m’a fait retraverser tout l’hôpital pour revenir dans ma chambre. On partageait la chambre avec un autre couple. Chacun restait dans sa bulle et on ne se parlait pas. Et au bout d’un moment, l’infirmière est arrivée et nous a remis un papier avec le nombre d’ovocytes. Moi, 6. Et j’ai entendu la fille à côté : « Oh oui, 30, génial ! ». Un « génial » qui me fait sentir encore plus mal. On a demandé si on pouvait rentrer, et pour la suite, on nous a dit qu’on nous appellerait. Quand ? On ne sait pas. Au bout de quelques jours, on a appris qu’aucun ovocyte n’avait tenu la fécondation, donc zéro embryon à transférer. Ce n’était pas la peine de revenir. On nous a dit qu’on ne pouvait pas nous redonner un rendez-vous avant 3 mois. Parce qu’on ne peut pas reprendre une FIV directement. Trois mois pour un débrief post-FIV ! Je voulais juste qu’on m’explique, je voulais des réponses, pas reprendre un protocole ! À force d’insister, la biologiste au laboratoire a fini par nous donner un rendez-vous. 

 

On lui a dit qu’on ne comprenait pas pourquoi, il y a un mois, on nous avait dit que tout allait bien se passer, et là, ça ne marchait pas. Elle nous a répondu qu’elle ne savait pas pourquoi et qu’il fallait voir le gynécologue. Encore un dialogue de sourds.

Mais comme nous insistions, elle a fini par exploser  : « Que voulez-vous que je vous réponde ? Il n’y a rien à dire, à part que vous êtes une mauvaise répondeuse. On vous donne un traitement de cheval et ça ne fonctionne pas… » 

« Allez en Espagne acheter des ovocytes. En France, on ne voudra jamais de vous, il y a trop d’attente, ça ne passera pas avec l’âge. », ce sont les mots que je retiens. Quelle claque ! Le discours du gynécologue a été sensiblement le même, à ceci près qu’il a ajouté : « Si vous insistez vraiment, on peut vous faire une FIV … » Sous-entendu, « pour vous faire plaisir ». Comme si ça faisait plaisir à quelqu’un de faire des FIV. On est rentrés abattus.

C’était quoi, ce délire ? À un mois d’intervalle, on est passés de « tout va bien » à « c’est tout moisi » et « je ne peux pas t’expliquer pourquoi », et surtout, « je ne vais pas t’aider », avec une empathie et un respect inexistants. On a eu l’impression d’être seuls. Voulaient-ils se débarrasser de nous parce qu’on était devenus gênants, avec notre échec et nos questions ? 

PMA à l’étranger ou hôpital privé : quelles solutions après un échec ?

À minuit ce soir-là, on a envoyé un mail à une clinique espagnole. Et le lendemain à 6 h, on a reçu une réponse en français avec plein d’informations sur ce qu’ils prévoyaient. Et surtout, un devis : 8000 euros.

Donc, on a préféré tenter un hôpital privé en banlieue parisienne, à l’opposé de chez nous.

Là, on est passés dans une autre réalité : pas d’attente au téléphone, tout le monde connaissait notre dossier. On nous a fait refaire des examens et on a découvert qu’en plus de l’endométriose, j’avais un SOPK. Comment ne l’avaient-ils pas vu plus tôt à l’hôpital public ? On nous a proposé un traitement un peu différent sans expliquer en quoi, pourquoi. Comme le centre était plus loin, c’était très fatigant, car il fallait se lever à 4h tous les deux jours pour y aller. En tout, entre les deux établissements, on a fait 3 FIV en 5 mois. Sur cette nouvelle FIV, on a obtenu 1 embryon transféré, mais rien. Sur la suivante, deux embryons transférés, et zéro grossesse. Et quand on demandait « pourquoi ? », « comment peut-on ajuster ? », personne ne pouvait répondre : « c’est compliqué, laissez-moi et faites-moi confiance. »

En termes de respect humain, c’était beaucoup mieux, mais, en termes de logistique, c’était très dur, et, niveau explications, on n’avait quasiment rien. On était perdus.

Au bout des 5 mois, j’étais au bout du bout physiquement, psychiquement. Je ne voyais pas où ça nous menait.

Quand je parlais d’une pause, à l’hôpital, on nous prévenait que plus on tardait, moins ça allait fonctionner.

On a décidé de tout mettre à plat : 

– Les FIV : il restait deux tentatives remboursées (comme la ponction sans transfert ne compte pas). Ça n’a pas fonctionné ni dans le public ni dans le privé. Je ne suis jamais tombée enceinte et on ne savait pas pourquoi : les embryons étaient-ils de mauvaise qualité ? L’utérus n’était-il pas propice à la nidation ? On ne savait pas. Les FIV, ça paraissait donc plutôt compromis.

– Le don d’ovocytes : forcément à l’étranger, car, en France, on ne voulait pas de nous. Mais si on était déjà fatigués d’aller à l’autre bout de l’Île-de-France, alors l’Espagne ! Et puis c’était trop cher. Du coup, non pour le don.

– Après, il y avait la GPA : c’est illégal en France, on aurait pu aller aux USA par exemple… Mais c’était très compliqué administrativement, logistiquement et financièrement (100 000 euros à l’époque)… On n’allait pas hypothéquer l’appartement pour ça. Donc non.

– Il restait l’adoption. J’étais plutôt pour. Ça me parlait. Donc on a regardé le site de l’association qui s’occupe de l’adoption. On a vu qu’il fallait un agrément accordé selon un protocole assez jugeant et aléatoire. À l’époque, il fallait être mariés. Le fait de devoir se marier pour avoir un enfant, ça m’énervait. On ne demande rien à ceux qui font des enfants naturellement. J’avais un fort sentiment d’injustice. En 2013, les statistiques montraient 28 000 agréments en cours pour 2 000 enfants adoptés seulement. Ce n’était pas beaucoup.

On avait lu que l’âge de l’enfant à adopter était proportionnel à celui des parents. Si on imagine un délai moyen de 5 ans avant d’y parvenir, j’aurais eu 43 ans et, si ça fonctionnait, on aurait eu un enfant âgé de 5 à 10 ans. Et beaucoup souffraient de troubles physiques ou mentaux. Est-ce qu’on était prêt à prendre le risque d’être parents d’un enfant de 5 à 10 ans, dont on ne parlerait peut-être même pas la langue, et qui pourrait avoir un problème physique ou mental ? On s’est dit non. On voulait un enfant tous les deux, mais pas dans ces conditions.

Pourquoi nous avons décidé d’arrêter la PMA ?

Il ne nous restait donc plus que les FIV à reconsidérer. Peut-être que ça avait une chance de marcher, mais on ne savait pas la quantifier. Pourquoi donc n’y avait-il pas de données claires ? Quelles étaient les statistiques pour les femmes de mon âge, avec mes pathologies ? J’aurais voulu des infos fiables pour prendre une décision.

Je n’étais pas remise des échecs, et autour de moi, il n’y avait que des gens pour qui ça marchait, et des photos de faire-part dans les centres de PMA.

J’avais l’impression d’être la seule pour qui ça ne marchait pas. Et même les médecins ne savaient pas pourquoi ça ne marchait pas. J’étais donc le cas rare. Je voulais sortir de ce truc-là au plus vite. Notre vie tournait uniquement autour de ça. Avec mon conjoint, on voulait retrouver la gaieté, le peps, la joie de vivre…

Notre vie était merveilleuse avant de s’être lancés dans la PMA et d’un coup, elle était devenue atroce.

On s’est laissé le temps qu’il faut, et au bout de quelques mois, c’est devenu clair que je ne voulais plus continuer dans ces conditions-là. On s’en est parlé. 

C’était probablement un des trucs les plus durs de ma vie : dire à mon conjoint que je ne voulais plus essayer. Je me disais qu’il allait me quitter pour une petite jeune. Mais lui ressentait la même chose. Il m’a même avoué que, dès la première FIV, quand il a vu comment ça se passait, les maltraitances, il était prêt à arrêter, mais il me voyait tellement impliquée, qu’il ne se sentait pas de me couper dans cet élan et de m’interdire ça.

Arrêter la PMA, ce n’est pas renoncer : c’est se protéger

Pour autant, ce n’est pas parce que la décision a été prise que tout allait bien. Oui, c’était une libération de ne plus faire de FIV, que la vie ne tourne plus autour de la PMA uniquement.
Mais dans les moments difficiles où je me disais que je n’aurais jamais d’enfant, je me demandais si je ne retenterais pas…, et au bout de 5 minutes de vagabondage du cerveau, je me rappelais ce que j’avais vécu, et je savais que, si on avait arrêté, c’est qu’aucune option n’était viable pour nous.

Quel que soit le chagrin que j’avais, ça n’allait pas rendre une option plus facile.

Il fallait se remettre de tout ça. Le poids des échecs, pourquoi ça marchait ailleurs, et pas chez moi ? Je ne serais jamais mère, mon copain ne serait jamais père à cause de moi. Ma sœur, mes amies avaient des enfants, je me sentais vraiment le vilain petit canard.

 

Je dis souvent que c’était une décision imposée, un choix entre deux moindres maux. Vivre sans enfants était moins pire que de retourner se faire malmener à l’hôpital pour des FIV qui ne donnaient rien, sans explication.
C’était une décision de survie, et pas juste « est-ce que je prends du fromage ou du dessert ».
Nous n’avions pas fait ce choix de gaieté de cœur. Je me suis choisie, moi. Ma santé physique et mentale, mon couple, par rapport à une très hypothétique parentalité.

PMA : sortir de l’injonction du « bats-toi à tout prix »

Il y avait aussi le poids de la culpabilité. S’il n’y avait aucune raison physiologique, est-ce que mon cerveau avait fait en sorte que mon corps n’ait pas pu avoir d’enfant ? Comme il n’y avait pas d’explication, c’était dur à digérer. 

Puis je me suis renseignée, j’ai regardé les rares statistiques disponibles et très génériques. En fait, non, la majorité des tentatives ne marchaient pas. J’aurais adoré le savoir avant pour faciliter ma guérison psychique. Ça aurait enlevé tellement de culpabilité.


Tout le monde se dit « ça marche », puisqu’on ne parle pas des gens qui ne continuent pas. Je ne suis plus en colère contre les médecins. Je sais qu’ils font ce qu’ils peuvent, mais je remarque une certaine omerta. Et si on avait des statistiques, des tableaux qui disent : « au vu de tel dossier, nos statistiques montrent qu’elle a 15 % de chances que ça fonctionne », il y aurait moins de culpabilité au moment de l’échec. Ça éviterait les questionnements, et en même temps, ça permettrait de dire : est-ce que j’ai envie de continuer ? On n’irait plus les yeux fermés.

J’ai beaucoup culpabilisé de ne pas être allée jusqu’à la 4e FIV.
Et ma psy m’a fait réaliser tout ce que j’avais fait avant : les stimulations, les inséminations, les 3 FIV… L’immense majorité des gens font l’amour une fois et c’est tout. Je n’ai pas rien fait.

J’ai eu besoin de me faire accompagner par un professionnel de santé mentale. Au fur et à mesure, j’ai fait ce deuil de la parentalité. Je me suis focalisée sur ce qu’on a plutôt que sur ce qu’on n’a pas. J’ai mis du temps, mais je suis tellement heureuse de la vie que j’ai aujourd’hui. Je suis alignée. 

À celles et ceux qui traversent ce parcours

Écoutez-vous, faites-vous confiance. Il y a plein de discours qui font du bruit, des injonctions sociétales. On dit souvent « vas-y, bats-toi, va jusqu’au bout ». Mais la question, c’est : au bout de quoi ? Des FIV remboursées ? Tu hypothèques ton appartement ? Tu renonces à changer ta vieille voiture ou à changer d’appartement pour faire des FIV en Espagne ? Elle est où la limite ? C’est à chacun de la trouver. Et surtout, faites-vous accompagner parce que c’est hyper important. La PMA prend tout : le temps, l’énergie physique, le mental, et c’est difficile de ne pas se perdre. Être accompagné t’aide à te dire si les limites que tu dépasses sont dangereuses pour toi, et ramène de la douceur. 

Le désert de solitude que j’ai traversé à l’époque m’a amenée à créer une association, pour tous ceux et toutes celles qui n’ont pas réussi à devenir parent malgré leur désir d’enfant. Quelle que soit la raison de ce deuil imposé de parentalité. Cette association, c’est Happy Moi : pour aider chacun à trouver sa voie vers son bonheur dans cette vie non choisie, mais qu’on peut rendre belle.

 

 

Suivre les actualités de l’association « Happy Moi » :

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Sandrine partage son parcours de PMA, entre endométriose, piqûres, rendez-vous à l’aube… et un choix courageux : celui d’arrêter la PMA, après 4 échecs IAC et 3 échecs de FIV, sans utiliser les 4 FIV autorisées par la Sécurité sociale. Un témoignage infiniment précieux. Parce qu’on dit souvent « bats-toi, va jusqu’au bout » — mais jusqu’où exactement ? Ce récit brise le silence sur les échecs, la charge mentale, et la légitimité de dire stop.

Quand l’endométriose chamboule tout !

Des enfants, j’en voulais… un jour. Dans l’absolu. Mais à 31 ans, en 2007, tout a basculé : de violentes douleurs à l’ovaire. Ma gynécologue ne sentait rien à l’examen, donc,  ça devait être dans ma tête. « Tout le monde a mal à un moment donné, ce n’est rien » ai-je entendu. Premier choc : je ne suis pas crue.

Alors j’ai insisté pour avoir une échographie. Qu’on finit par m’accorder de mauvaise grâce, en suggérant que je contribue à creuser le trou de la Sécu pour rien ! Et là, pendant l’examen, tout s’emballe : on parle d’urgence, de radio, puis d’IRM. Finalement, après des examens complémentaires, on me dit que c’est « juste » un kyste hémorragique. On me conseille de ne surtout pas l’enlever (comme si je pouvais le faire toute seule !). Aucune explication, pas de temps à me consacrer et je ressens beaucoup de mépris de la part des soignants devant mes questions.

 

Je cherche alors un autre avis et j’obtiens un rendez-vous avec un gynécologue hospitalier. Il m’explique que cela peut être grave… ou pas. Il faut attendre. Quelques mois plus tard, toujours la même douleur. Le kyste est retiré. À mon réveil, le diagnostic tombe : endométriose. Il y en avait à plusieurs endroits. Et là, je suis prévenue : « Ça va être compliqué pour faire des enfants, ne tardez pas ». Je suis passée du soulagement — on enlève ce truc qui fait mal – à « je dois décider tout de suite si je veux des enfants ou pas. »

J’étais en couple, mais ce n’était pas l’homme de ma vie. On n’en était pas là a priori. Mais après quelques mois de réflexion, mon conjoint m’a annoncé qu’il était partant. OK, c’était maintenant

Infertilité et PMA : métro, boulot, piquouses

On a essayé naturellement pendant un an et ça n’a pas fonctionné. Puis, le docteur nous a fait faire des « essais naturels monitorés » : tous les matins à 6h, tous les jours, en week-end, en vacances, je prenais ma température. Et je devais suivre le même régime que les femmes enceintes pour maximiser les chances : pas d’alcool, pas de viande crue… Dès le début, c’était hyper contraignant. Normalement, pour avoir un enfant, c’est juste du sexe. C’est plutôt sympa. Là, tout est devenu froid, du médical dans notre intimité. Rien n’était spontané. C’était compliqué intérieurement… et ça n’a pas marché.

On nous a fait passer aux inséminations. C’était la course : le matin j’allais faire des prises de sang dans un endroit, puis des échographies dans un autre, puis j’allais au boulot. Le soir, c’était  le stress pour attraper le train de banlieue à l’heure pour aller faire la piqûre, qui m’attendait dans le frigo de la maison (pas de frigo au boulot pour la stocker). Le jour de l’insémination, j’allais chercher le sperme de mon conjoint en plein Paris à l’heure du déjeuner. J’attendais deux heures, je courais avec mon précieux chargement chez le gynéco, qui procédait en 3 minutes à l’insémination et zou, je retournais travailler, épuisée physiquement et mentalement, tout en prenant des commentaires sur « mes déj’ de ministre ».

On a fait 4 inséminations en 6 mois. Les médecins disaient : « Faites votre vie normalement ». Désolée, mais non, je ne faisais pas juste ma vie normale. Je n’étais jamais détendue. Au quotidien je courais, dans les moments festifs, je ne devais manger que des légumes, sans boire… Je ne pouvais rien prévoir : pas de vacances, pas de théâtre, parce que le stylo d’injection doit rester au frigo… je me suis retrouvée enfermée dans une vie qui tournait autour de ça et zéro explication de pourquoi ça ne marchait pas.

J’avais l’impression de voir un maître d’école qui regardait ma production d’ovocytes, mais sans rien m’expliquer de concret : ce qu’il prévoit, ce que je vis, ce que j’ai, comment fonctionne le traitement, pourquoi ça n’a pas marché, et qu’est-ce qui va faire que ça va marcher … Rien ! C’était assez nouveau, je suis rentrée dans une matrice dont je voulais sortir. Le côté humain était inexistant. Au mieux, les soignants étaient totalement indifférents, au pire, méprisants et désagréables.

 

En 2009, comme les inséminations n’avaient pas fonctionné, on nous a dit d’aller à l’hôpital pour tenter des FIV. Personne ne savait nous dire si c’était grave ou pas. Je savais juste que j’avais de l’endométriose et mon conjoint n’avait rien de spécifique. Le service a fermé pour l’été donc on devait revenir en septembre. Pendant cet été-là, avec mon conjoint, on s’est séparés. Ce n’était pas la PMA qui nous a séparés, mais ça a été un déclencheur. Ça faisait 6 ans qu’on était ensemble. J’étais en colère d’avoir fait tout ça pour rien, mais soulagée de ne pas être tombée enceinte, parce que ça aurait été horrible d’être séparée avec un enfant à peine né.

35 ans, célibataire et stérile.

Niveau feel good, je vous laisse imaginer ! Ce n’était vraiment pas gagné que j’aie des enfants plus tard. Quel homme voudrait se mettre avec une fille stérile ? Pour moi, c’était hyper clair que si je rencontrais quelqu’un, je ne voulais pas qu’il ait déjà des enfants, pour qu’il découvre la parentalité avec moi. Donc, ça réduisait le spectre de la recherche.

 

Je pensais que j’allais mourir dévorée par mes chats, comme Bridget Jones. Tu te sens bien ostracisée quand tu n’as pas d’enfants ou de mec stable à cet âge-là ! En plus stérile, j’étais la paria… et puis, quand les gens ne savent pas quoi dire, ils ne parlent que de leurs gosses. Je n’ai jamais compris pourquoi cette maladresse et/ou absence totale d’empathie à mon encontre.

 

Mais à 36 ans, contre toute attente, j’ai rencontré le prince charmant ; sans carrosse, avec sa Clio bleue. Il avait 7 ans de moins que moi. Il habitait à Toulouse, moi à Paris. On a commencé à sortir ensemble et assez rapidement, je lui ai dit que j’avais des problèmes de fertilité. Et c’est compliqué de dire à quelqu’un que ça va être difficile d’avoir un enfant. Je ne voulais pas passer pour la fille pour qui c’est une priorité ; je ne cherchais pas juste un géniteur, mais je ne pouvais pas cacher cette vérité. Heureusement, il n’est pas parti en courant. C’est même tout l’inverse.

Relancer un parcours PMA à 37 ans

On était en 2012, j’avais 37 ans. C’est à ce moment que mon conjoint m’a dit qu’il voudrait qu’on ait des enfants. Moi, j’étais focalisée sur notre belle histoire d’amour. Je ne m’autorisais pas à penser à la maternité. Mais quand il m’a dit ça, on a décidé de repartir à l’hôpital. On a refait les examens. Dans ma tête, comme j’avais 38 ans, j’imaginais le pire : ça allait être difficile, ou j’aurais plus de risques d’avoir un enfant handicapé… Pourtant, les médecins étaient hyper rassurants, même si j’avais l’impression qu’ils n’expliquaient jamais rien. Juste : « Ça va aller, faites-nous confiance ».

 

S’en sont suivis 25 jours de stimulation très difficiles, physiologiquement, en termes d’organisation et de rythme : levée tôt le matin pour prendre le premier train de banlieue pour réaliser les échographies et les prises de sang. Je rentrais vite le soir chez moi avec mon train de banlieue pour me faire la piqûre à l’heure dite. Vie sociale : zéro. J’étais épuisée, et ça jouait sur mon mental. À l’hôpital, il me semblait même que les infirmières m’engueulaient : « Vous êtes dure à piquer !». J’avais des bleus partout sur les bras. 

Vient le jour de la ponction : l’usine. Douche à la Bétadine et cheveux mouillés (en plein novembre), on m’a fait traverser l’hôpital tout entier sur un brancard , en chemise d’hôpital, les fesses  à l’air ! Dans la pièce de ponction, le médecin ne s’est même pas présenté, il ne m’a même pas adressé la parole. Et il y avait plein d’autres personnes dans la salle, ils parlaient de leur vie, de ce qu’ils avaient fait le week-end en m’ignorant totalement. Moi, j’avais les pieds dans les étriers face à la porte, et des gens entraient et sortaient. Une scène surréaliste. Je me sentais tellement vulnérable !

Puis, on m’a fait retraverser tout l’hôpital pour revenir dans ma chambre. On partageait la chambre avec un autre couple. Chacun restait dans sa bulle et on ne se parlait pas. Et au bout d’un moment, l’infirmière est arrivée et nous a remis un papier avec le nombre d’ovocytes. Moi, 6. Et j’ai entendu la fille à côté : « Oh oui, 30, génial ! ». Un « génial » qui me fait sentir encore plus mal. On a demandé si on pouvait rentrer, et pour la suite, on nous a dit qu’on nous appellerait. Quand ? On ne sait pas. Au bout de quelques jours, on a appris qu’aucun ovocyte n’avait tenu la fécondation, donc zéro embryon à transférer. Ce n’était pas la peine de revenir. On nous a dit qu’on ne pouvait pas nous redonner un rendez-vous avant 3 mois. Parce qu’on ne peut pas reprendre une FIV directement. Trois mois pour un débrief post-FIV ! Je voulais juste qu’on m’explique, je voulais des réponses, pas reprendre un protocole ! À force d’insister, la biologiste au laboratoire a fini par nous donner un rendez-vous. 

 

On lui a dit qu’on ne comprenait pas pourquoi, il y a un mois, on nous avait dit que tout allait bien se passer, et là, ça ne marchait pas. Elle nous a répondu qu’elle ne savait pas pourquoi et qu’il fallait voir le gynécologue. Encore un dialogue de sourds.

Mais comme nous insistions, elle a fini par exploser  : « Que voulez-vous que je vous réponde ? Il n’y a rien à dire, à part que vous êtes une mauvaise répondeuse. On vous donne un traitement de cheval et ça ne fonctionne pas… » 

« Allez en Espagne acheter des ovocytes. En France, on ne voudra jamais de vous, il y a trop d’attente, ça ne passera pas avec l’âge. », ce sont les mots que je retiens. Quelle claque ! Le discours du gynécologue a été sensiblement le même, à ceci près qu’il a ajouté : « Si vous insistez vraiment, on peut vous faire une FIV … » Sous-entendu, « pour vous faire plaisir ». Comme si ça faisait plaisir à quelqu’un de faire des FIV. On est rentrés abattus.

C’était quoi, ce délire ? À un mois d’intervalle, on est passés de « tout va bien » à « c’est tout moisi » et « je ne peux pas t’expliquer pourquoi », et surtout, « je ne vais pas t’aider », avec une empathie et un respect inexistants. On a eu l’impression d’être seuls. Voulaient-ils se débarrasser de nous parce qu’on était devenus gênants, avec notre échec et nos questions ? 

PMA à l’étranger ou hôpital privé : quelles solutions après un échec ?

À minuit ce soir-là, on a envoyé un mail à une clinique espagnole. Et le lendemain à 6 h, on a reçu une réponse en français avec plein d’informations sur ce qu’ils prévoyaient. Et surtout, un devis : 8000 euros.

Donc, on a préféré tenter un hôpital privé en banlieue parisienne, à l’opposé de chez nous.

Là, on est passés dans une autre réalité : pas d’attente au téléphone, tout le monde connaissait notre dossier. On nous a fait refaire des examens et on a découvert qu’en plus de l’endométriose, j’avais un SOPK. Comment ne l’avaient-ils pas vu plus tôt à l’hôpital public ? On nous a proposé un traitement un peu différent sans expliquer en quoi, pourquoi. Comme le centre était plus loin, c’était très fatigant, car il fallait se lever à 4h tous les deux jours pour y aller. En tout, entre les deux établissements, on a fait 3 FIV en 5 mois. Sur cette nouvelle FIV, on a obtenu 1 embryon transféré, mais rien. Sur la suivante, deux embryons transférés, et zéro grossesse. Et quand on demandait « pourquoi ? », « comment peut-on ajuster ? », personne ne pouvait répondre : « c’est compliqué, laissez-moi et faites-moi confiance. »

En termes de respect humain, c’était beaucoup mieux, mais, en termes de logistique, c’était très dur, et, niveau explications, on n’avait quasiment rien. On était perdus.

Au bout des 5 mois, j’étais au bout du bout physiquement, psychiquement. Je ne voyais pas où ça nous menait.

Quand je parlais d’une pause, à l’hôpital, on nous prévenait que plus on tardait, moins ça allait fonctionner.

On a décidé de tout mettre à plat : 

– Les FIV : il restait deux tentatives remboursées (comme la ponction sans transfert ne compte pas). Ça n’a pas fonctionné ni dans le public ni dans le privé. Je ne suis jamais tombée enceinte et on ne savait pas pourquoi : les embryons étaient-ils de mauvaise qualité ? L’utérus n’était-il pas propice à la nidation ? On ne savait pas. Les FIV, ça paraissait donc plutôt compromis.

– Le don d’ovocytes : forcément à l’étranger, car, en France, on ne voulait pas de nous. Mais si on était déjà fatigués d’aller à l’autre bout de l’Île-de-France, alors l’Espagne ! Et puis c’était trop cher. Du coup, non pour le don.

– Après, il y avait la GPA : c’est illégal en France, on aurait pu aller aux USA par exemple… Mais c’était très compliqué administrativement, logistiquement et financièrement (100 000 euros à l’époque)… On n’allait pas hypothéquer l’appartement pour ça. Donc non.

– Il restait l’adoption. J’étais plutôt pour. Ça me parlait. Donc on a regardé le site de l’association qui s’occupe de l’adoption. On a vu qu’il fallait un agrément accordé selon un protocole assez jugeant et aléatoire. À l’époque, il fallait être mariés. Le fait de devoir se marier pour avoir un enfant, ça m’énervait. On ne demande rien à ceux qui font des enfants naturellement. J’avais un fort sentiment d’injustice. En 2013, les statistiques montraient 28 000 agréments en cours pour 2 000 enfants adoptés seulement. Ce n’était pas beaucoup.

On avait lu que l’âge de l’enfant à adopter était proportionnel à celui des parents. Si on imagine un délai moyen de 5 ans avant d’y parvenir, j’aurais eu 43 ans et, si ça fonctionnait, on aurait eu un enfant âgé de 5 à 10 ans. Et beaucoup souffraient de troubles physiques ou mentaux. Est-ce qu’on était prêt à prendre le risque d’être parents d’un enfant de 5 à 10 ans, dont on ne parlerait peut-être même pas la langue, et qui pourrait avoir un problème physique ou mental ? On s’est dit non. On voulait un enfant tous les deux, mais pas dans ces conditions.

Pourquoi nous avons décidé d’arrêter la PMA ?

Il ne nous restait donc plus que les FIV à reconsidérer. Peut-être que ça avait une chance de marcher, mais on ne savait pas la quantifier. Pourquoi donc n’y avait-il pas de données claires ? Quelles étaient les statistiques pour les femmes de mon âge, avec mes pathologies ? J’aurais voulu des infos fiables pour prendre une décision.

Je n’étais pas remise des échecs, et autour de moi, il n’y avait que des gens pour qui ça marchait, et des photos de faire-part dans les centres de PMA.

J’avais l’impression d’être la seule pour qui ça ne marchait pas. Et même les médecins ne savaient pas pourquoi ça ne marchait pas. J’étais donc le cas rare. Je voulais sortir de ce truc-là au plus vite. Notre vie tournait uniquement autour de ça. Avec mon conjoint, on voulait retrouver la gaieté, le peps, la joie de vivre…

Notre vie était merveilleuse avant de s’être lancés dans la PMA et d’un coup, elle était devenue atroce.

On s’est laissé le temps qu’il faut, et au bout de quelques mois, c’est devenu clair que je ne voulais plus continuer dans ces conditions-là. On s’en est parlé. 

C’était probablement un des trucs les plus durs de ma vie : dire à mon conjoint que je ne voulais plus essayer. Je me disais qu’il allait me quitter pour une petite jeune. Mais lui ressentait la même chose. Il m’a même avoué que, dès la première FIV, quand il a vu comment ça se passait, les maltraitances, il était prêt à arrêter, mais il me voyait tellement impliquée, qu’il ne se sentait pas de me couper dans cet élan et de m’interdire ça.

Arrêter la PMA, ce n’est pas renoncer : c’est se protéger

Pour autant, ce n’est pas parce que la décision a été prise que tout allait bien. Oui, c’était une libération de ne plus faire de FIV, que la vie ne tourne plus autour de la PMA uniquement.
Mais dans les moments difficiles où je me disais que je n’aurais jamais d’enfant, je me demandais si je ne retenterais pas…, et au bout de 5 minutes de vagabondage du cerveau, je me rappelais ce que j’avais vécu, et je savais que, si on avait arrêté, c’est qu’aucune option n’était viable pour nous.

Quel que soit le chagrin que j’avais, ça n’allait pas rendre une option plus facile.

Il fallait se remettre de tout ça. Le poids des échecs, pourquoi ça marchait ailleurs, et pas chez moi ? Je ne serais jamais mère, mon copain ne serait jamais père à cause de moi. Ma sœur, mes amies avaient des enfants, je me sentais vraiment le vilain petit canard.

 

Je dis souvent que c’était une décision imposée, un choix entre deux moindres maux. Vivre sans enfants était moins pire que de retourner se faire malmener à l’hôpital pour des FIV qui ne donnaient rien, sans explication.
C’était une décision de survie, et pas juste « est-ce que je prends du fromage ou du dessert ».
Nous n’avions pas fait ce choix de gaieté de cœur. Je me suis choisie, moi. Ma santé physique et mentale, mon couple, par rapport à une très hypothétique parentalité.

PMA : sortir de l’injonction du « bats-toi à tout prix »

Il y avait aussi le poids de la culpabilité. S’il n’y avait aucune raison physiologique, est-ce que mon cerveau avait fait en sorte que mon corps n’ait pas pu avoir d’enfant ? Comme il n’y avait pas d’explication, c’était dur à digérer. 

Puis je me suis renseignée, j’ai regardé les rares statistiques disponibles et très génériques. En fait, non, la majorité des tentatives ne marchaient pas. J’aurais adoré le savoir avant pour faciliter ma guérison psychique. Ça aurait enlevé tellement de culpabilité.


Tout le monde se dit « ça marche », puisqu’on ne parle pas des gens qui ne continuent pas. Je ne suis plus en colère contre les médecins. Je sais qu’ils font ce qu’ils peuvent, mais je remarque une certaine omerta. Et si on avait des statistiques, des tableaux qui disent : « au vu de tel dossier, nos statistiques montrent qu’elle a 15 % de chances que ça fonctionne », il y aurait moins de culpabilité au moment de l’échec. Ça éviterait les questionnements, et en même temps, ça permettrait de dire : est-ce que j’ai envie de continuer ? On n’irait plus les yeux fermés.

J’ai beaucoup culpabilisé de ne pas être allée jusqu’à la 4e FIV.
Et ma psy m’a fait réaliser tout ce que j’avais fait avant : les stimulations, les inséminations, les 3 FIV… L’immense majorité des gens font l’amour une fois et c’est tout. Je n’ai pas rien fait.

J’ai eu besoin de me faire accompagner par un professionnel de santé mentale. Au fur et à mesure, j’ai fait ce deuil de la parentalité. Je me suis focalisée sur ce qu’on a plutôt que sur ce qu’on n’a pas. J’ai mis du temps, mais je suis tellement heureuse de la vie que j’ai aujourd’hui. Je suis alignée. 

À celles et ceux qui traversent ce parcours

Écoutez-vous, faites-vous confiance. Il y a plein de discours qui font du bruit, des injonctions sociétales. On dit souvent « vas-y, bats-toi, va jusqu’au bout ». Mais la question, c’est : au bout de quoi ? Des FIV remboursées ? Tu hypothèques ton appartement ? Tu renonces à changer ta vieille voiture ou à changer d’appartement pour faire des FIV en Espagne ? Elle est où la limite ? C’est à chacun de la trouver. Et surtout, faites-vous accompagner parce que c’est hyper important. La PMA prend tout : le temps, l’énergie physique, le mental, et c’est difficile de ne pas se perdre. Être accompagné t’aide à te dire si les limites que tu dépasses sont dangereuses pour toi, et ramène de la douceur. 

Le désert de solitude que j’ai traversé à l’époque m’a amenée à créer une association, pour tous ceux et toutes celles qui n’ont pas réussi à devenir parent malgré leur désir d’enfant. Quelle que soit la raison de ce deuil imposé de parentalité. Cette association, c’est Happy Moi : pour aider chacun à trouver sa voie vers son bonheur dans cette vie non choisie, mais qu’on peut rendre belle.

 

 

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