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La progestérone, c’est quoi, pourquoi, comment et quand ?

Par Nathalie Massin
Chef de service d’Aide Médicale à la Procréation.
Endocrinologie de la reproduction.

Souvent surnommée « hormone de la nidation», la progestérone est sécrétée chez la femme par le corps jaune, résidus du follicule après l’ovulation, pendant la deuxième phase du cycle menstruel et pendant la grossesse.  Le Dr Nathalie Massin, endocrinologue de la reproduction, responsable de centre AMP du CHI de Créteil vous explique comment fonctionne la progestérone, pourquoi on peut proposer un traitement de progestérone et répond à toutes les questions (même les plus gênantes) que vous vous posez ! 

D’abord, qu’est-ce que la progestérone ?

N.M. : On dit que c’est une hormone « stéroïde », comme l’estradiol, car elle est produite à partir du cholestérol. La progestérone est indispensable pour l’obtention et le maintien d’une grossesse. Juste après l’ovulation, le follicule qui contenait l’ovocyte se transforme en « corps jaune » et c’est cette transformation qui fait que les cellules du follicule se mettent à produire la progestérone, en plus de l’estradiol qu’elles produisaient dans la première partie du cycle. Le cycle rentre alors dans sa phase dite « lutéale », où, grâce à la progestérone, l’endomètre se transforme pour pouvoir accueillir un éventuel embryon. En l’absence d’embryon, le corps jaune arrête de sécréter la progestérone et l’estradiol, et l’endomètre n’est plus retenu dans la cavité utérine ; ce sont les règles. En présence d’un embryon, la production de progestérone va augmenter progressivement et permettre le maintien de la grossesse. La progestérone, soit produite par l’ovaire, soit absorbée en traitement, est donc une hormone indispensable à la grossesse.

Existe-t-il un taux de référence ?

N.M. : Le seuil de référence pour une ovulation de qualité ou un traitement efficace est autour de 10 ng/ml. Il peut varier légèrement selon le laboratoire d’analyse et le moment où la prise de sang est faite.

À PROPOS DE LA SUPPLÉMENTATION EN PROGESTÉRONE

Dans quel cas, les médecins proposent-ils un traitement de supplémentation en progestérone ? 

N.M. :  Un traitement par progestérone est quasiment systématiquement proposé après une stimulation de l’ovulation, en particulier car le mécanisme de la stimulation ovarienne va entrainer une perturbation des sécrétions de FSH et LH qui sont indispensables à une bonne production de progestérone. Probablement qu’un certain nombre de femmes n’en ont pas vraiment l’utilité, mais c’est impossible de le déterminer avant que cela ne soit trop tard. Donner systématiquement de la progestérone est donc une sécurité. La progestérone peut également être utilisée quand aucune ovulation n’a lieu, dans un cycle artificiel. Ici, elle permet de remplacer totalement la progestérone naturelle, soit pour obtenir des règles (en général elle est arrêtée au bout de 10 jours) soit pour permettre une grossesse. Dans ce cas précis, elle doit être impérativement poursuivie jusqu’à 10 semaines de grossesse (date à laquelle le placenta sécrète une quantité suffisante de progestérone). En cas de menace de fausse couche quand une grossesse a débuté naturellement, il arrive que de la progestérone soit prescrite. Les études scientifiques divergent à ce sujet et il n’est pas certain que la progestérone soit utile pour diminuer le risque d’arrêt de la grossesse.

À partir de quand dans le cycle stimulé ou avant le transfert se commence le traitement ?

N.M. : Le traitement par progestérone n’est pas totalement codifié, on peut donc trouver des petites différences dans les prescriptions selon les praticiens. Le plus souvent la progestérone est débutée le soir de la ponction d’ovocytes dans le cadre d’une FIV ou 24-48h après l’insémination intra-utérine. Un bilan hormonal n’est pas systématique. Dans le cas du transfert d’embryons congelés, le calcul pour le début du traitement va dépendre du bilan hormonal et il est préférable de bien se référer à son médecin qui décidera quand un contrôle du dosage de progestérone est nécessaire.

Capsule vaginale, injection sous-cutanée ou intramusculaire, gel, suppositoire, patch. Y a-t-il un mode d’administration plus efficace ?

N.M. : La progestérone est disponible sous plusieurs formes qui sont équivalentes, mais dont la voie n’est pas interchangeable. Par exemple, les capsules très efficaces par voie vaginale ne sont pas aussi efficaces quand elles sont prises par voie orale, leur utilisation par voie orale est pour d’autres usages que l’AMP. Par voie vaginale, il existe également un gel. Il existe de la progestérone orale (la dydrogestérone) et de la progestérone en injection sous-cutanée. Parfois, 2 voies peuvent être données simultanément quand il est nécessaire d’avoir des taux plus élevés.

Pourquoi les traitements doivent-ils être continués en cas de grossesse jusqu’à la fin du 1er trimestre ?

N.M. :  Dans la grande majorité des cas, dès le test de grossesse positif, la production de progestérone par l’ovaire est suffisante et le traitement externe pourrait être arrêté. Cependant, il est le plus souvent d’usage d’attendre d’avoir vérifié que la grossesse est bien évolutive à l’échographie pour arrêter le traitement. En revanche, dans certains cas il est absolument indispensable de poursuivre la progestérone jusqu’à 10-12 semaines d’aménorrhée (c’est-à-dire à la fin du premier trimestre) au risque de déclencher une fausse couche. Ce sont en particulier les cas du transfert d’embryon congelé quand la préparation du cycle a été faite uniquement par les hormones (cycles artificiels), et pas par une ovulation. Il est donc impératif de bien suivre les indications de votre médecin et d’être très rigoureuse sur la prise du traitement.

Comment se diffuse la progestérone dans le corps et que faire en cas d’oubli de la prise du traitement ?

N.M. : La progestérone, par voie vaginale, sous-cutanée ou orale, diffuse dans l’ensemble du corps et va agir sur différents tissus du corps, en particulier l’utérus et le col (transformation de l’endomètre et diminution des contractions utérines), mais également sur le cerveau. En cas d’oubli, prenez immédiatement le traitement et la dose suivante à l’heure prévue, 2 doses peuvent être prises simultanément. En cas de doute, interrogez votre médecin.

Est-ce que la progestérone doit être prise à heure fixe ?

N.M. : D’une manière générale, privilégiez les horaires fixes et suffisamment espacés pour être répartis sur la journée. Mais vous n’avez pas besoin de mettre votre réveil la nuit pour autant ! Dans le doute, demandez conseil au centre qui vous suit.

QUELS SONT LES PRINCIPAUX EFFETS SECONDAIRES, EN FONCTION DU MODE D’ADMINISTRATION ?

N.M. : Il y a peu d’effets secondaires de la voie orale et sous-cutanée en dehors des réactions locales.
Pour la voie vaginale, le principal désagrément sont les pertes vaginales qui peuvent varier d’une femme à l’autre et être parfois très abondantes. Il est important d’essayer de retirer le maximum de progestérone avec le doigt avant de remettre une nouvelle capsule vaginale pour favoriser l’absorption de la nouvelle capsule. Rassurez-vous, l’importance de ces pertes n’a pas de rapport avec un manque d’absorption.
Attention la progestérone naturelle en capsule vaginale peut également être prise par voie orale (efficacité moindre) mais dans ce cas elle entraine souvent des problèmes d’étourdissement ou de somnolence.

EST-CE QUE LA PROGESTÉRONE TROUBLE LES RÉSULTATS DU TEST B-HGC ?

N.M. :  La progestérone n’a pas d’effet sur le taux d’HCG, elle ne pourra donc pas être responsable d’un faux positif.

PARLONS PLUS PRECISEMENT DES CAPSULES VAGINALES…

Doit-on mettre la capsule vaginale jusqu’au fond du vagin ?

N.M. : Oui au maximum ! A chaque femme de trouver la position qui lui permet un accès plus facile et profond.

Que faire si la capsule vaginale retombe ?

N.M. :  Immédiatement après l’insertion, en cas de perte, vous pouvez remettre l’ovule. A distance, en règle générale, l’absorption a déjà eu lieu et ce n’est pas nécessaire d’en remettre un.

Est-ce normal d’avoir beaucoup de progestérone dans le fond du vagin ou qui retombe ?

N.M. : Les pertes sont normales, tant qu’elles sont inodores.

Y a-t-il des précautions pour éviter les mycoses et comment soigner une mycose pendant le traitement ?

N.M. :  Parlez-en avec votre médecin qui peut adapter la voie de traitement et vérifier s’il s’agit bien d’une mycose et non pas d’une allergie aux capsules. Le traitement de la mycose « classique » peut être associé à la progestérone.

Les rapports sexuels sont-ils proscrits pendant la prise du traitement ?

N.M. : Non, les rapports peuvent continuer (y compris avec pénétration et éjaculation). Dans ce cas, mettez la capsule après le rapport.

LA PROGESTÉRONE DANS VOTRE ALIMENTATION

Au sujet de l’alimentation, Frédérique Besson, ingénieur nutritionniste spécialisée dans la fertilité, explique que la vitamine C permettrait d’augmenter naturellement le taux de progestérone (agrumes, fruits rouges, kiwi, poivrons, persil) tout comme le sélénium, qui selon de récentes études, participerait à la bonne formation du corps jaune et donc a une bonne production de progestérone (noix de brésil, fruits de mer et poisson).

En phytothérapie, deux plantes sont dites « progestérone-like » c’est-à-dire qu’elles agissent sur l’équilibre hormonal, en mimant l’activité de la progestérone et ainsi en la régulant. Il s’agit du gattilier et de l’alchémille. Le Gattilier est LA plante du déséquilibre hormonal, elle a une action anti-œstrogène et progestérone-like. Des études scientifiques ont montré que le gattilier peut être efficace pour réguler les cycles menstruels, notamment dans le cadre du syndrome des ovaires polykystiques (SOPK). Attention, le gattilier agit au niveau de l’hypophyse, donc ne le prenez jamais en automédication.

L’alchémille a aussi une action progestérone-like, ce qui en fait notamment une plante très utilisée pour les cycles irréguliers.